7/8 MARS 1944 - BOMBARDEMENT DE LA GARE DE TRIAGE DU MANS (72)
Etude réalisée par Michel Coste sur une proposition du sujet d'André Hautier

INTRODUCTION

Dans le cadre de la préparation du Débarquement en Normandie, les mois précédant le 6 juin 1944 (mars, avril, mai) vont voir se développer un nombre considérable d'attaques aériennes sur les centres ferroviaires stratégiques (The Transportation Plan) dans le but de les détruire et de paralyser au maximum le déplacement des renforts venant du Nord, du Centre, du Sud de la France et d'Allemagne.

Le Mans de par sa position proche du lieu du débarquement subira, dès le mois de mars, de multiples raids alliés qui se prolongeront tout au long du débarquement et de la progression des troupes alliées lors de la Bataille de Normandie et inaugurera, comme à Trappes (78), le début des bombardements ciblés organisés par le Bomber Command en prévision du D-Day .

CIBLE 

BOMBARDEMENT 

A 20h40, l'avant garde de l'armada alliée venant du NE se présente au-dessus de la cible avec un ciel couvert de nuages. Les avions marqueurs sont absents entrainant un encombrement propice aux collisions. L'attente dure près de 20 mn.

Sans visualisation de la cible due à une couverture nuageuse persistante et l'absence de tout marquage, cent quatre avions n'effectuent pas le bombardement et s'en retournent à leur base après s'être délestés de leurs cargaisons.

Les équipages restants, la cible étant alors délimitée par le marquage, n'hésitent pas à traverser le plafond nuageux. Malheureusement cette couverture nuageuse empêche de visualiser avec précision la cible. Se fiant aux rougeoiements des TI certains équipages larguent leurs cargaisons de bombes, provoquant morts et désolation parmi la population civile.
Dès le début, les zones situées au NO de la cible et entre la ligne de chemin de fer du Mans à Tours bordant le triage et la RN23 sont 'arrosées'. Le quartier du Maroc et les cités ( Cité du Pied Sec, du Mans, des Pins, de la Vallée aux Poules) subissent de plein fouet les effets du bombardement.


Lexique:
  • Documents, rapports et cartes sur le PDF de www.archives-historiques.sncf.fr
  • LES DESTRUCTIONS 


    Photo issue du livre: The Battle of France Then and now - Peter D Cornwell

    1) Gare de triage dite du Maroc (a,b,c,d sur la photo aérienne):

    Les destructions les plus importantes, paralysant pour quelques temps le trafic, sont répertoriées sur ce site. Suite à ce bombardement, les évolutions des machines entre le dépôt et la gare de triage ne peuvent se faire que sur une seule voie de rentrée (voie 1) pour pénétrer dans le dépôt.

    2) Dépôt Conséquences: 3/Quartier du Maroc (f), Cité du Pied sec (e), Cité de la Vallée aux poules (i), Cité des Pins.
    Aux dires des rapports du Bomber Command le raid fut un succès, ayant permis la neutralisation momentanée du site. Il semblerait que seulement 30 bombes soient tombées sur des zones peuplées de civils, provoquant la mort de 31 civils et en blessant 45.

    Aucun avion perdu.

    COMPTES RENDUS DE MISSION

    Selon le 427 Sq
    Très nuageux, sans pluie devenant beau, la visibilité devenant très bonne.
    Le Squadron a été retenu ce jour pour fournir 14 avions. La cible à bombarder est Le Mans. Tous nos avions ont décollé mais le 'J' piloté par le F/Sgt King dut retourner précocement suite à un ennui de moteurs.
    Pour le reste, 10 ont attaqué la cible. 3 étant incapables de visualiser les TI marqueurs se sont débarrassé de leurs bombes et ont abandonné la force principale conformément aux instructions.
    Les conditions météorologiques sur la cible étaient très nuageuses (9/10) avec un plafond à 2140 mètres. Les Mosquitos marqueurs étaient en retard et ont eu des difficultés lors de la localisation de la cible, avant leur descente, suite à cette couverture nuageuse inattendue.
    Plusieurs petits incendies furent visibles. Une grande explosion fut observée vers 21h34 par un de nos équipages. La plupart des équipages considère cette attaque très dispersée. Pas de présence ennemie.

    Selon le 78 Sq (Halifax LW795)
    Décollage 19h23. Atterrissage 23h58
    La cible principale fut attaquée et bombardée d'une hauteur de 4572 mètres. La cible fut identifiée par le rougeoiement des TI rouge à travers les nuages. Les défenses étaient plus importantes que prévues. 304 avions : 242 Halifax, 56 Lancaster, 6 Mosquito des 3, 4, 6 et 8 groupes sur Le Mans. Aucune perte.
    La cible était couverte de nuages mais il semblerait que les dommages soient très importants. Environ 300 bombes sont tombées dans la gare de triage. 250 wagons sont détruits, beaucoup de voies sont coupées. Une plaque tournante est mise hors service et 6 locomotives touchées.

    Les équipages de la RCAF bombardent la cible entre 3658 mètres et 4268 mètres réalisant le largage de 1,019,000 Ibs de bombes hautement explosives.

    Les avions pilotés par Sgt A Yaworski, P/O H Holland, F/O G Weldon (427 Sqn) n'effectuent pas le largage car ils ne visualisent aucun TI, il en est de même pour les équipages de F/O C Ford, F/Lt Lord, W/O2 Weldon (428 Sqn), P/O E Giles (429 Sqn), F/Lt J Valentine (431 Sqn), F/O A Mercer, F/Sgt D Maddock, F/O W Smith, F/Sgt E Clarke, P/O S Hawkins, F/O J Barker (432 Sqn), P/O J Major et 7 équipages du 433 Sqn soit 22 avions.

    CONCLUSION

    Bien que la mission, de par les destructions provoquées sur le site ferroviaire, fut un succès elle laisse au sein de la population un goût amer. Bien préparée par le Bomber Command, dans le but de provoquer le moins de dégâts collatéraux, elle fut perturbée par une météo détestable, une coordination désorganisée qui eurent des conséquences dramatiques sur la suite du raid.
    Tout au long du conflit ces bombardements ciblés de grande ampleur, bien qu'acceptés par une population asservie, firent naitre des ressentiments au sein des français vis à vis des aviations alliées, ce qui fut le cas dans la ville meurtrie du Mans cette nuit du 7/8 mars 1944.

    SOURCES ET LIENS

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